Le projet de territoire a mis Quiberville, Longueil et Sainte-Marguerite à la une des grands médias nationaux et régionaux. Désormais, la basse vallée de la Saâne fait figure de modèle d’adaptation au changement climatique.
« La mer va nous chahuter » : c’est le titre du reportage consacré à la Saâne dans L’Obs du 30 octobre 2021. « Pour lutter contre les conséquences du changement climatique, un projet territorial de « reconnexion terre-mer » est prévu, poursuit l’hebdomadaire. Son but : redonner sa place originelle au fleuve côtier et laisser entrer la mer dans la vallée ».
Quelques semaines plus tôt, c’est le quotidien La Croix qui avait publié un dossier intitulé « Montée des eaux : comment les villes du littoral français s’adaptent » avec un focus sur la Saâne et son projet.
Depuis, ça n’a pas cessé : en 2022, la plupart des grands médias nationaux ont consacré des reportages à la basse vallée, interviewant les élus, les acteurs du projet, les usagers de l’actuel camping de Quiberville… Incontestablement, la relocalisation du camping, le reméandrage de la rivière, sa nouvelle connexion à la mer et l’effort d’assainissement concrétisé par la station d’épuration de Longueil impressionnent les journalistes, tous médias confondus.
A la télé, TF1 et France 2 ont fait le déplacement, et la Saâne a eu les honneurs du « 20-heures » de France 2 et du « 13-heures » de la une. Sur le service public, France 24, la chaine francophone internationale, n’est pas en reste : en octobre 2021, c’est par deux reportages dans la Saâne que la chaine a illustré les enjeux du dérèglement climatique à l’occasion de la COP 26 qui se déroulait à Glasgow. La journaliste Cyrielle Cabot s’appuyait sur le cas de la Saâne pour mettre en évidence les risques côtiers d’une part, mais aussi les solutions d’adaptation du territoire aux nouvelles conditions et aux attentes des habitants et des usagers.
TF1, de son côté, relayait les espoirs et les craintes des habitués de l’actuel camping, dont ils vont devoir faire le deuil. Son reportage (« Érosion : les derniers jours d’un camping ») s’attardait sur le choix auquel sont confrontés ces vacanciers : migrer vers le nouvel équipement touristique, ou renoncer à ces vacances sur ce bout de littoral normand auxquelles ils se sont habitués depuis parfois plusieurs décennies. « Relocaliser une activité économique à cause de la crise climatique : ce projet est l’un des plus avancés en France », explique en écho France 2 dans son reportage diffusé le 5 juillet 2022. Et la chaine du service public prévient que le coût de 7 millions d’euros engendré par la relocalisation du camping devra être multiplié dans les années à venir : « le recul du trait de côte touche l’ensemble de la France, des entreprises devront déménager, comme des particuliers ». « Ce projet, poursuit la journaliste de France 2 Sandrine Feydel, a mis près de 10 ans à se réaliser. Il est l’un des rares exemples d’adaptation, trop rares selon le Haut-Conseil pour le climat. Pour lui, la France n’est pas prête à faire face aux évolutions climatiques à venir ».
Même conclusion pour sa consœur Caroline de Malet, dans Le Figaro du 7 novembre 2022 : « Au-delà de la région, Saint-Jean-de-Luz ou Lacanau, pour ne citer qu’elles, planchent aussi sur des solutions de repli. Mais un projet comparable est plus difficile à mettre en œuvre dans une région où le foncier est encore plus rare et cher ». Son reportage s’intitule « Comment Quiberville va relocaliser son camping face à la montée des mers ». « Financé à 70 % par l’Europe et 30 % par les collectivités locales, explique Le Figaro, ce projet s’inscrit dans le cadre d’une démarche plus large. Mais sans financements européens, il n’aurait pu voir le jour. En parallèle, une station d’épuration va être construite à Longueil, à l’intérieur des terres, de sorte que les eaux usées n’impacteront plus la qualité des eaux de baignade de Quiberville. Enfin, la buse de 1,5 mètre de diamètre par laquelle la Saâne se jette dans la Manche – freinant le passage des poissons migrateurs – va être remplacée par un pont de dix mètres de large sur la route côtière pour connecter la terre à la mer ».
« Quiberville est un modèle, et une rarissime exception, écrit de son côté le quotidien Le Monde, dans un dossier consacré à l’évolution des campings littoraux sur l’ensemble du territoire français. Le déménagement du camping préfigure un avenir pas si lointain, estiment les spécialistes du changement climatique. La multiplication des événements violents pourrait nécessiter de déplacer des terrains installés dans les années 1970, lorsque la loi littoral et la protection des espaces naturels n’existaient pas. Au changement climatique s’ajoute la nouvelle doctrine de l’Etat face aux risques de submersion marine : fini la protection, jugée coûteuse et inefficace à moyen terme, place à l’adaptation ». Et comme ses confrères de France 2 ou du Figaro, le journaliste du Monde Clément Guillou relève le caractère pionnier du projet Basse Saâne 2050 : « Le ministère du tourisme évalue à 369 le nombre de campings menacés par le recul du trait de côte. Près du double mordent sur la bande littorale des 100 mètres, et un quart des 7 800 campings français sont exposés à un risque naturel – submersion marine, érosion côtière, inondation, voire chutes de rochers. Ces campings étant les mieux placés, ils représentent la moitié de la fréquentation totale, selon la Fédération nationale de l’hôtellerie de plein air ».
Après les journalistes, il ne serait pas surprenant que les professionnels du tourisme de plein-air défilent dans la vallée pour y trouver des solutions à leurs angoisses existentielles…